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On peut avancer qu'il n’y a pas
meilleure occasion qu’aujourd'hui pour en parler.
Je livre ici deux textes commis par mes
soins sur la nécessité de la paix entre les nations.
Le premier écrit à la veille des
attentats du 11 septembre 2001[1].
Le second est un extrait d'un ouvrage
sur le dialogue entre les religions, les cultures et les civilisations comme
contribution à la paix.
Il a été publié en 2014 [2].
J'ajoute à ces deux notes, un article fécond écrit par
Albert Camus au lendemain de la bombe américaine balancée sur Hiroshima
le 6 août 1945..!!
A la fin, on livre à nos lecteurs des extraits de 2
discours sur la guerre du principal acteur de la révolution française Maximilien Robespierre,
***
"Paix
et dialogue et tolérance, le cas du Maghreb et du Moyen- Orient"
(Extraits
)
La paix dans le
monde, un rêve ?
Le dialogue
entre les religions et les civilisations, une utopie ?
Peut-on
imaginer un monde sans guerre ? un fantasme !!
Et pourtant
cette aspiration de l’humanité à la paix, à la concorde et à la coopération n’a
jamais aussi forte et aussi pressante.
La paix est un
vocable et une notion qui ont été usés à force d’être utilisés..
Les rapports
entre les Etats et la peuples sont dictés par des considérations qui tranchent
avec la morale, l’éthique et les bons sentiments.
Les intérêts de
tout ordre, la folie des grandeurs, les honneurs et la propension des
puissances à dominer…sont, entre autres critères, qui commandent le comportement
des Etats.
Un président mexicain, Porfirio Díaz, aurait dit « Pauvre
Mexique, trop loin de dieu et trop prêt de l’Amérique »..
Une formule
courte et concise mais combien révélatrice de la réalité des
rapports interétatiques.
Après
l’effondrement du mur de Berlin en 1989, l’humanité avait commencé à rêver d’un
nouvel ordre international.. ; quelques années après l’espoir né d’une
unité d’un peuple et d’un continent, l’Européen, s’est niché dans les limbes.
En effet, aux
conflits entre les Etats qui avaient dominé le monde de 1945 à 1989 est venu se
greffer des guerres internes de connotation ethnique, religieuse, irrédentiste
et séparatiste.
Avec le
printemps arabe, ce monde est entré
presque dans une ère de guerre de religion à l’instar de l’Europe il y a
quelques siècles.
Mais doit –on
désespérer de l’humain ? Evidemment non.
La mémoire de
l’humanité est, depuis au moins deux siècles, est imprégnée des droits de
l’homme, de la démocratie, de la liberté…et du dialogue … Le siècle des
Lumières est passé par là et ce malgré des horreurs (l’esclavagisme, la
colonisation et ses méfaits destructeurs…) commis depuis.
Une
mondialisation régulée, des systèmes éducatifs performants, une participation réelle et consciente des
citoyens dans les affaires de leurs cités et de leurs pays à travers le monde, sont,
entre autres , les seuls garants d’un monde meilleur.
Quelle
utopie ? Et pourtant c’est la seule voie du salut. Faute de volonté
politique commune et de la gestion en commun du monde, le chaos n’est pas une
simple hypothèse mais une perspective quasi certaine
Doit –on donc
continuer à rêver ? Evidemment oui.
Un philosophe
français d’origine roumaine Emil Cioran disait « la vie sans utopie
devient à la longue irrespirable » .
Note de présentation
DIALOGUE ENTRE RELIGIONS ET CULTURES, CONTRIBUTION MAJEURE A LA
CULTURE DE LA PAIX.
« Nous,
peuples des Nations Unies, résolus à préserver les générations futures du fléau
de la guerre qui deux fois en l'espace d'une vie humaine a infligé à l'humanité
d'indicibles souffrances » (préambule de la charte des Nations
Unies)
Dans le préambule de la charte de l'UNESCO, on peut
lire :
"Que,
les guerres prenant naissance dans l'esprit des hommes, c'est dans l'esprit des
hommes que doivent être élevées les défenses de la paix ; que l'incompréhension
mutuelle des peuples a toujours été, au cours de l'histoire, à l'origine de la
suspicion et de la méfiance entre nations, par où leurs désaccords ont trop souvent
dégénéré en guerre".
Dans le même esprit le représentant personnel du
Secrétaire général pour l'Année des Nations Unies pour le dialogue entre les
civilisations, M. Giandomenico Picco disait : «ce n'est pas l'histoire qui
tue, ce ne sont pas les religions qui violent les femmes, ce n'est pas la
pureté du sang qui détruit les bâtiments... seuls les individus se livrent à de
tels actes ».
Pour répondre à ces préoccupations et interpellations
et relever les défis qui s'imposent à l'humanité notamment après 1989, où les
replis identitaires et les conflits entre religions risquent d'hypothéquer pour
ne pas dire qu'ils ont déjà altéré les rapports entre les nations et les
peuples, l'Assemblée générale a décrété l'année 2000, année de la culture et de
la paix et l'année 2001 année de dialogue entre les civilisations. Ces deux
années commémoratives conjuguées nous ont inspiré la thématique suivante :
Dialogue entre religions et civilisations,
contribution majeure à la culture de la paix.
Cette problématique s'impose d'autant plus que les
particularismes et les irrédentismes identitaires et religieux sont encore
source de plusieurs conflits dans le monde ; il paraît donc utile voire
impératif d'appeler à un dialogue soutenu et fort entre les religions, d'où
notre souci d'opérer la jonction entre le religieux et le civilisationnel dans
cette approche.
Contrairement aux prédictions de l'Américain Samuel
Huntington qui a parlé de choc entre les civilisations et les cultures,
d'aucuns, plus optimistes estiment que le dialogue entre civilisations,
religions et cultures est possible. Il tombe sous le sens que son
approfondissement et sa généralisation auront un rôle déterminant dans la
promotion de la culture de la paix.
De même, contrairement aux premières prédictions
développées au lendemain de la chute du mur de Berlin parlant de la lutte entre
le Nord et le Sud, les riches et les pauvres, les surinformés et les sous
informés, d'autres, en revanche, considèrent que cette trajectoire n'est pas
une fatalité pour l'homme ; un autre chemin est possible. Il n'est pas facile
mais il n'est pas impossible.
Les événements du 11 septembre dernier, marqués par
les attentats à New York et à Washington, peuvent privilégier l'idée d'une
irréversibilité d'un affrontement entre deux ensembles civilisationnels antagoniques.
Bien au contraire, ces événements douloureux confortent la nécessité de ce
dialogue. Mais, cela suppose une réelle prédisposition de tous les Etats et les
nations pour l'instauration de nouveaux rapports entre eux et une nouvelle
approche et gestion du problème du monde.
L'ONU et l'UNESCO se sont donc données un vaste et
ambitieux programme d'action sur cette thématique. Notre journée d'étude
s'inscrit dans cette même lignée. Aussi, serait-elle articulée de la manière
suivante :
I)
Du dialogue : significations et perceptions.
II)
Les différentes actions de l'ONU dans la promotion de
la culture du dialogue et de la paix.
Si l'acceptation de l'idée du dialogue
peut paraître théoriquement facile à faire admettre pour les élites et les
décideurs, elle reste, en revanche difficile à faire partager pour les grandes
masses ; aussi, un travail en profondeur et pédagogique devrait être réalisé
par les Etats, les ONG et tous ceux qui aspirent à vivre ensemble avec leurs
différences. L'ONU a un rôle à jouer à ce niveau-là. Dans quelles mesures, les
différentes actions de l'ONU ont ou non contribué à la promotion de la culture,
du dialogue et de la paix ?
Cela constitue le deuxième volet de cette journée
d'étude.
Septembre 2001
A.B.T.
Albert Camus
Le plaidoyer
pour la paix, après Hiroshima le 8 août 1945[3]
" Le monde est ce qu'il est, c'est-à-dire peu de chose.
C'est ce que chacun sait depuis hier grâce au formidable concert que la radio,
les journaux et les agences d'information viennent de déclencher au sujet de la
bombe atomique.
On nous apprend, en effet, au milieu d'une foule de commentaires
enthousiastes que n'importe quelle ville d'importance moyenne peut être
totalement rasée par une bombe de la grosseur d'un ballon de football. Des journaux
américains, anglais et français se répandent en dissertations élégantes sur
l'avenir, le passé, les inventeurs, le coût, la vocation pacifique et les
effets guerriers, les conséquences politiques et même le caractère indépendant
de la bombe atomique. Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation
mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir
choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou
l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques.
En attendant, il est permis de penser qu'il y a quelque
indécence à célébrer ainsi une découverte, qui se met d'abord au service de la
plus formidable rage de destruction dont l'homme ait fait preuve depuis des
siècles. Que dans un monde livré à tous les déchirements de la violence,
incapable d'aucun contrôle, indifférent à la justice et au simple bonheur des
hommes, la science se consacre au meurtre organisé, personne sans doute, à
moins d'idéalisme impénitent, ne songera à s'en étonner.
Les découvertes doivent être enregistrées, commentées selon ce
qu'elles sont, annoncées au monde pour que l'homme ait une juste idée de son
destin. Mais entourer ces terribles révélations d'une littérature pittoresque
ou humoristique, c'est ce qui n'est pas supportable.
Déjà, on ne respirait pas facilement dans un monde torturé.
Voici qu'une angoisse nouvelle nous est proposée, qui a toutes les chances
d'être définitive. On offre sans doute à l'humanité sa dernière chance. Et ce
peut-être après tout le prétexte d'une édition spéciale. Mais ce devrait être
plus sûrement le sujet de quelques réflexions et de beaucoup de silence.
Au reste, il est d'autres raisons d'accueillir avec réserve le
roman d'anticipation que les journaux nous proposent. Quand on voit le
rédacteur diplomatique de l'Agence Reuter annoncer que cette invention rend
caducs les traités ou périmées les décisions mêmes de Potsdam, remarquer qu'il
est indifférent que les Russes soient à Koenigsberg ou la Turquie aux
Dardanelles, on ne peut se défendre de supposer à ce beau concert des
intentions assez étrangères au désintéressement scientifique.
Qu'on nous entende bien. Si les Japonais capitulent après la
destruction d'Hiroshima et par l'effet de l'intimidation, nous nous en
réjouirons.
Mais nous nous refusons à tirer d'une aussi grave nouvelle autre
chose que la décision de plaider plus énergiquement encore en faveur d'une
véritable société internationale, où les grandes puissances n'auront pas de
droits supérieurs aux petites et aux moyennes nations, où la guerre, fléau
devenu définitif par le seul effet de l'intelligence humaine, ne dépendra plus
des appétits ou des doctrines de tel ou tel État.
Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité,
nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être
mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers
les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la
raison. "
Albert Camus
éditorial de "Combat", journal clandestin de la
Résistance, du 8 août 1945
Discours de Robespierre contre la guerre
Extrait de son discours sur la guerre prononcé à la Société des
Amis de la Constitution, le 18 décembre 1791 :
"La guerre est toujours le premier vœu d’un gouvernement
puissant qui veut devenir plus puissant encore. Je ne vous dirai pas que c’est
pendant la guerre que le ministère achève d’épuiser le peuple et de dissiper
les finances, qu’il couvre d’un voile impénétrable ses déprédations et ses
fautes ; je vous parlerai de ce qui touche plus directement encore le plus
cher de nos intérêts. C’est pendant la guerre que le pouvoir exécutif déploie
la plus redoutable énergie, et qu’il exerce une espèce de dictature qui ne peut
qu’effrayer la liberté naissante ; c’est pendant la guerre que le peuple
oublie les délibérations qui intéressent essentiellement ses droits civils et
politiques pour ne s’occuper que des événements extérieurs, qu’il détourne son
attention de ses législateurs et de ses magistrats pour attacher tout son
intérêt et toutes ses espérances à ses généraux et à ses ministres, ou plutôt
aux généraux et aux ministres du pouvoir exécutif. C’est pour la guerre qu’ont
été combinées, par des nobles et par des officiers militaires, les dispositions
trop peu connues de ce code nouveau qui, dès que la France est censée en état
de guerre livre la police de nos villes frontières aux commandants militaires,
et fait taire devant eux les lois qui protègent les droits des citoyens. C’est
pendant la guerre que la même loi les investit du pouvoir de punir
arbitrairement les soldats. C’est pendant la guerre que l’habitude d’une
obéissance passive, et l’enthousiasme trop naturel pour les chefs heureux,
fait, des soldats de la patrie, les soldats du monarque ou de ses généraux.
Dans les temps de troubles et de factions, les chefs des armées deviennent les
arbitres du sort de leur pays, et font pencher la balance en faveur du parti
qu’ils ont embrassé. Si ce sont des Césars ou des Cromwells, ils s’emparent
eux-mêmes de l’autorité. Si ce sont des courtisans sans caractère, nuls pour le
bien, mais dangereux lorsqu’ils veulent le mal, ils reviennent déposer leur
puissance aux pieds de leur maître, et l’aident à reprendre un pouvoir
arbitraire, à condition d’être ses premiers valets."
Source : Œuvres de
Maximilien Robespierre, Tome VIII, Édition du Centenaire de la Société des
études robespierristes, Éditions du Miraval à Enghien-les-Bains, p. 48 et 49.
Extrait de son discours sur la guerre prononcé à la Société
des Amis de la Constitution, le 2 janvier 1792 :
"La plus extravagante idée qui puisse naître dans la tête
d’un politique, est de croire qu’il suffise à un peuple d’entrer à main armée
chez un peuple étranger, pour lui faire adopter ses loix et sa constitution.
Personne n’aime les missionnaires armés ; et le premier conseil que
donnent la nature et la prudence, c’est de les repousser comme des ennemis."
Source : Œuvres de
Maximilien Robespierre, Tome VIII, Édition du Centenaire de la Société des
études robespierristes, Éditions du Miraval à Enghien-les-Bains, p. 81 et 82.
[1]
Abdelmoughit
Benmessaoud Trédano (sous la direction de), Dialogue entre religions et
civilisations, contribution majeure à la culture de la paix Ed. Confluences,
Rabat, 2003, 150 p ; 2ème édition « Cahiers Libres » N°1, Fév.
2014,
[2] Abdelmoughit Benmessaoud Trédano, Paix et dialogue et tolérance,le cas du Maghreb et du
Moyen- Orient. Avant et après le printemps arabe. Nouvelle collection :
« Cahiers Libres » N°1, Fév. 2014,1ère édition, juin 2014 2ème
édition, collection Confluences
[3]https://blogs.mediapart.fr/register/blog/110717/le-plaidoyer-pour-la-paix-dalbert-camus-apres-hiroshima-le-8-aout-1945
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